Colton, Austin, Texas 2019, from « Plan américain series » © Scarlett Coten

Inside Out

Espace MLB

Du 15 juillet au 15 août 2020

Du jeudi au dimanche de 15h à 20h et sur RDV

Semaine du 20 au 27 juillet
> ouverture mardi 21 – mercredi 22 Jeudi 23 – vendredi 24 – samedi 25  de 17h30 à 21h

En dehors de ces horaires, nous sommes heureuses de vous accueillir sur rendez-vous avec
Scarlett Coten > 06 61 64 00 43
Colette Pourroy > 06 12 99 57 46
MLB > 06 16 95 37 08

Scarlett Coten – vidéo

Colette Pourroy – photographie

MLB – vidéo

Scarlett Coten / Plan Américain 2017 – 2019

Scarlett Coten est une photographe française. Après des études à l’Ecole Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles, elle se consacre essentiellement à des projets personnels à long terme, explorant principalement les thèmes de l’identité, du genre et de l’intimité. Son travail a été largement exposé, et récompensé, notamment par le Prix Leica Oskar Barnack en 2016 et le Photolucida Top 50 Critical Mass en 2018.
En 2019, Plan américain a été finaliste des Sony World Photography Awards (catégorie Portrait), du PHmuseum Photography Grant, du Grand Prix ImageSingulières de la photographie documentaire et de la Bourse du Musée Albert-Kahn.
«La volonté d’être soi, semer le trouble dans le genre en affirmant ses différences dans une société profondément binaire et patriarcale, est un acte politique. Aujourd’hui, pour un homme, dire sa vérité, être vulnérable, est un acte de rébellion. Mon travail existe pour alimenter cette rébellion.
« Plan américain », qui explore comment la masculinité est vécue et exprimée par la jeune génération aujourd’hui aux Etats-Unis, tente d’influencer l’imagination et notre compréhension d’une notion qui échappe à la définition simple, en regard de la complexité de ses multiples formes et expressions.
Dans une société américaine au climat politique précaire, où la montée d’un nationalisme masculiniste est encouragée par un dirigeant prônant l’image d’une virilité dure et rétrograde, il était nécessaire de rendre visible la présence d’une nouvelle masculinité décomplexée, aussi bien dans les grandes villes que les plus petites bourgades.
Au début du printemps 2017, je me lance dans cette aventure qui va durer trois ans. Trump est à la Maison Blanche depuis trois mois, l’Amérique est en crise et #MeToo n’a pas encore éclaté. C’est dans le contexte de cette « administration de la discrimination », que je parcours des routes inconnues à la recherche de visages que je veux photographier. Des hommes qui à chaque escale, offrent la nature fluide et plurielle de ce que signifie être un homme aujourd’hui.
Je photographie toujours des sujets qui s’impliquent dans ce projet, en choisissant des lieux spécifiques, sélectionnés pour favoriser une expérience libératrice. En me concentrant sur la non-conformité, la beauté et les vulnérabilités d’un sexe tenu aux idéaux rigides, oppressifs et datées du genre, mon approche qui se veut empathique, s’efforce de bouleverser les représentations sexistes et réductrices pour révéler un concept plus large et plus inclusif des masculinités contemporaines.
Ce travail, abordant les thèmes du patriarcat, du pouvoir, de la sexualité, de l’identité, de la race, et de la perception féminine des hommes, considère de fait la nécessité de points de vue alternatifs, dans le but de réinventer l’identité de genre pour le monde d’aujourd’hui, accompagné du désir de questionner une histoire de l’art elle même peu inclusive. »

Colette Pourroy / Ève Réincarnée – 2017

Ève première femme, première née, sœur aînée, sœur aimée… Il y a dans cette série photographique de Colette Pourroy quelque chose de l’ordre de la déclaration d’amour sororal, exprimée avec la volonté de revisiter un territoire de l’intime et l’urgence de conjurer la fuite des souvenirs fussent-ils dévastateurs. Ces images semblent hantées par le train de la mémoire qui inexorablement poursuit sa course de l’enfance à l’âge adulte. Latentes mais résistantes, elles nous racontent une histoire jusqu’alors restée au seuil de la parole et qui trouvent dans la transposition photographique un palliatif à la douleur de l’énonciation. Le flou vaporeux, le contraste entre le blanc laiteux et le noir profond qui les caractérisent confèrent à la séquence qu’elles composent un aspect hallucinatoire. A la netteté photographique, la photographe préfère en effet une représentation délibérément troublée par une vitesse d’exposition sous- estimée, une focale imprécise et une lumière radicalement violente et écrasante comme pour donner à voir le non-dit.
Pourtant, ce n’est pas de ces rapports à l’indicible que vient le malaise se dégageant de la lecture des images mais bien plutôt de l’ambiguïté qui s’y loge. Ainsi, nombreux sont les signes de la duplicité : la main est celle qui se tend et celle qui contraint, la fenêtre peut être ouverte pour respirer l’air frais dans une pièce devenue étouffante mais aussi devenir l’instrument d’un suicide, le drap être celui sous lequel on se cache avec l’innocence des jeux de l’enfance ou avec la sensualité des premiers émois amoureux mais aussi celui qui recouvre un corps à la morgue. Dans cette narration visuelle se tissent une infinité d’histoires scandées par un certain nombre de leitmotive : l’ouverture, l’emprisonnement, le double, la dissimulation, la ligne de partage d’où émerge un « visage lunaire », une féminité fragile. La traversée symbolique des trois âges de la vie que condense ici la littérarité des images semble donner une place prépondérante à l’adolescence, à ce moment incertain de l’existence où tout peut basculer. La présence de la photographe, de la sœur, du double retrouvé après la solitude et le huis-clos n’est pourtant pas salvatrice. Il n’y a pas de reconstruction grâce au regard de l’autre, fusse-t-il photographique et empathique : une vitre, un voile persiste entre les âmes et les séparent. L’issue fatale que l’on pressentait demeure le point d’orgue de la composition. La morte-vivante dont on suivait les pas hagards s’est bel et bien brûlée les ailes dans l’obscurité et il faut en accepter la perte.
On se souvient évidemment ici des textes de Virginia Woolf et de sa description des émotions qui souvent se dissipent dans la mort. « Sentir profondément quelque chose, c’était créer un abîme entre soi- même et les autres, qui, eux aussi, sentent profondément peut-être mais différemment » écrivait la romancière britannique dans La Traversée des apparences. La subtilité dans le partage, dans la transmission des affects est ce qui fait la force du travail de Colette Pourroy car sans doute, pour elle, la photographie conserve une fonction cathartique et lui permet de mettre en scène des épisodes de son histoire personnelle pour qu’enfin s’en libèrent les démons. Ici, il s’agit bien de souvenirs enfouis mais ils sont rejoués, réactivés par le truchement de l’appareil. Ces sentiments transposés se jouent dans un théâtre des émotions et non dans une livraison abrupte d’instants présents. Si « photobiographique » il y a ici, au sens où l’avait inventé Gilles Mora dans les années 80, c’est dans la métamorphose à l’œuvre d’une émotion personnelle en une émotion avant tout photographique, qui ne jaillit pas de l’évènement que l’on devine mais bien plutôt des images qui se dévoilent, de leur rythme haletant, de la transe qui les anime en un récit. Les titres, alors, qui pourraient apparaître redondants tant les images parlent d’elles-mêmes, deviennent des didascalies à l’attention du spectateur, enjoint à chercher dans les plis du drap du lit, lieu de plaisir et de mort, le squelette d’une vie brisée.
Texte : Héloïse Conésa – Conservatrice du patrimoine chargée de la photographie contemporaine, Département des Estampes et de la Photographie, Bibliothèque nationale de France

MLB / Dematerializing the Self – 2020
Projet autobiographique en période confinée.
Portrait de l’intériorité.

Dematerializing the Self ©MLB 2020

Dematerializing the Self © MLB – 2020

Miroir Incertain © COLETTE POURROY 2017

Miroir Incertain © Colette Pourroy – 2017

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34 rue des Arènes
13200 Arles

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